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Revolut transforme ses employés en rivaux, un vrai scénario Black Mirror

Une stratégie interne controversée pour redorer l’image d’une entreprise

Revolut, la licorne britannique spécialisée dans les services financiers numériques, a récemment attiré l’attention avec une initiative interne pour le moins atypique. Inspirée par des dynamiques compétitives dignes des épisodes dystopiques de la série Black Mirror, l’entreprise a introduit un système de compétition interne entre ses employés. Cette initiative semble être une tentative stratégique pour améliorer à la fois la productivité et l’image publique de l’entreprise, qui a été ternie ces dernières années par des accusations de culture de travail toxique. Alors que l’entreprise se prépare à franchir de nouveaux jalons dans sa croissance, notamment une entrée en bourse ambitieusement estimée à 45 milliards de dollars d’ici 2025, cette démarche soulève des questions éthiques et pratiques. Peut-on vraiment motiver les employés par la compétition interne, ou cela risque-t-il d’accentuer les problèmes déjà signalés par le passé ?

Un lourd passif à effacer

Revolut traîne derrière elle une réputation peu enviable en matière de gestion des ressources humaines. Des enquêtes publiées en 2019 avaient mis en lumière une culture d’entreprise marquée par des exigences démesurées : horaires à rallonge, pression constante pour atteindre des objectifs souvent jugés irréalistes, et une instabilité professionnelle avec des licenciements fréquents pour des performances jugées insuffisantes. Ces pratiques avaient conduit de nombreux employés à quitter l’entreprise après moins d’un an. Pour une entreprise qui se positionne comme leader de l’innovation dans le secteur financier, cette image de « machine à broyer » les collaborateurs n’est pas sans conséquences. Afin de redorer son blason, Revolut mise sur des initiatives internes qui, d’une part, visent à motiver les équipes et, d’autre part, à projeter une image plus positive auprès du public et des investisseurs.

Le modèle compétitif interne : entre innovation et controverse

La dernière initiative de l’entreprise consiste à introduire un système de compétition interne entre les employés. Plutôt que de se limiter à des évaluations de performance classiques, Revolut encourage ses équipes à se mesurer les unes aux autres dans une sorte de classement permanent. Les meilleurs obtiennent des récompenses ou des privilèges, tandis que les moins performants sont mis en lumière, parfois de manière peu flatteuse. Si l’objectif affiché est de stimuler la productivité et l’engagement des employés, ce modèle n’est pas sans rappeler les scénarios dystopiques popularisés par la série Black Mirror, où l’humain est réduit à des statistiques et des classements. Dans le monde réel, ce type de système peut avoir des conséquences importantes sur le bien-être des employés, notamment en termes de stress, de santé mentale et de relations interpersonnelles au sein des équipes.

Les risques d’une telle approche

Un effet pervers sur la collaboration

L’un des principaux inconvénients des systèmes de compétition interne est leur impact potentiel sur la collaboration entre collègues. Lorsque les employés sont constamment en concurrence, la coopération peut passer au second plan. Les membres de l’équipe peuvent hésiter à partager des informations ou à s’entraider, de peur que cela ne les désavantage dans le classement. Pour une entreprise comme Revolut, qui dépend fortement de l’innovation et de la coordination entre différentes équipes, un tel effet pourrait s’avérer contre-productif. Plutôt que de renforcer les liens au sein des équipes, cette dynamique pourrait créer des tensions et des divisions internes.

Une pression accrue sur les employés

La mise en place de classements internes peut également accentuer la pression ressentie par les employés. Ceux qui se retrouvent régulièrement en bas du classement peuvent voir leur moral chuter, ce qui affecte leur productivité et leur engagement. Dans les cas les plus extrêmes, cela peut même conduire à des problèmes de santé mentale ou à un turn-over accru. Pour une entreprise déjà critiquée pour sa gestion des ressources humaines, cette approche risque de raviver des accusations de pratiques toxiques. Les employés pourraient percevoir ce système comme une nouvelle forme de contrôle oppressif plutôt que comme une opportunité de croissance personnelle.

Un risque d’image pour l’entreprise

Si l’objectif de Revolut est de redorer son image publique, cette initiative pourrait avoir l’effet inverse. Les médias et le public sont de plus en plus sensibles aux questions de bien-être au travail et aux pratiques éthiques des entreprises. Un système de compétition interne perçu comme excessif pourrait renforcer les critiques à l’encontre de l’entreprise, plutôt que de les atténuer.

Les alternatives possibles pour motiver les employés

Revolut aurait pu explorer d’autres approches pour améliorer la productivité et l’engagement de ses équipes, sans recourir à des méthodes aussi polarisantes. Voici quelques alternatives qui pourraient s’avérer plus efficaces et moins controversées :

  • Programmes de reconnaissance : Mettre en place des récompenses pour les performances exceptionnelles, sans comparer directement les employés entre eux.
  • Formation et développement : Offrir des opportunités de formation continue pour permettre aux employés de progresser et de se sentir valorisés.
  • Feedback constructif : Favoriser une culture du feedback régulier et constructif, axé sur l’amélioration individuelle plutôt que sur la comparaison.
  • Initiatives de bien-être : Investir dans des programmes de bien-être pour améliorer la satisfaction et la santé mentale des employés.

Ces approches, moins axées sur la compétition et plus sur la collaboration et le développement personnel, pourraient contribuer à créer un environnement de travail plus sain et plus productif à long terme.

Les enjeux pour l’avenir de Revolut

Alors que Revolut se positionne pour une entrée en bourse ambitieuse, l’entreprise ne peut se permettre de négliger sa réputation. Les investisseurs, tout comme les clients, sont de plus en plus attentifs aux pratiques internes des entreprises, notamment en ce qui concerne la gestion des employés et l’éthique. Si l’initiative de compétition interne peut offrir des résultats à court terme en termes de productivité, elle comporte des risques importants pour la stabilité et l’image de l’entreprise à long terme. La clé pour Revolut sera de trouver un équilibre entre innovation et respect des besoins humains de ses employés.

Un pari risqué

En fin de compte, la démarche de Revolut reflète une tension bien connue dans le monde de la tech : comment maintenir une croissance rapide et des performances élevées sans sacrifier le bien-être des employés ? Si l’histoire de l’entreprise est un indicateur, ce pari pourrait s’avérer risqué. Reste à voir si cette initiative marquera un tournant positif ou si elle renforcera les critiques à l’encontre de la culture d’entreprise de Revolut.